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A propos de l'auteur

  • Valérie PEREZ

    Fondatrice de ce site et auteur de la majorité des articles mis en ligne.
    Professeur agrégée et docteur en philosophie.

Le Supplément au voyage de Bougainville fut composé en 1773, soit un an après la publication du Voyage autour du monde de Bougainville. Diderot ne publia pas cette œuvre mais la fit circuler parmi ses amis. Le thème de cet ouvrage est annoncé dès le début de l’œuvre : « Le voyage de Bougainville est le seul qui m’ait donné du goût pour une autre contrée que la mienne ; jusqu’à cette lecture j’avais pensé qu’on n’était nulle part aussi bien que chez soi. »

Le Supplément est une œuvre de fiction. Dans l’extrait que nous étudions, Orou et l’aumônier s’entretiennent de religion. Le Tahitien avait proposé à son interlocuteur de choisir avec laquelle de ses filles et de sa femme il souhaitait passer la nuit. L’ aumônier, choqué par ses propos, lui répond que sa religion lui interdit de telle chose. C’est ici le point de départ d’une discussion touchant à la religion :

La forme dialogique est récurrente sous la plume de Diderot : Le neveu de Rameau, Jacques le fataliste, Le rêve de D’Alembert, … Elle permet à l’auteur d’exprimer des idées avec force. Suivant la mode de l’exotisme de son époque, Diderot soumet l’existence de Dieu et les pratiques religieuses à la conscience critique d’un Tahitien. Nous sommes en présence de deux interlocuteurs que tout oppose : l’aumônier, qui représente les mœurs de la société française du XVIIIème siècle, et en particulier les religieux, et Orou, personnage qui n’est pas nommé par sa fonction mais par un prénom aux connotations exotiques. L’œuvre de fiction permet de faire passer des idées sur un mode plaisant. Le dialogue les rend plus vivantes.

I/Les jeux sur les temps.

D’abord par les jeux temporels : le présent et le futur, un futur hypothétique (emploi du conditionnel présent). Cette opposition temporelle est caractéristique des genres délibératif et démonstratif.

Par exemple dans le texte 1, 1ère partie de la longue réplique d’Orou, le présent symbolise l’omniprésence et l’intemporalité du Dieu des catholiques, religion qui apparaît comme immuable : « qui est partout, et qu’on ne voit nulle part ; qui dure aujourd’hui et demain, et qui n’a pas un jour de plus ; qui commande et qui n’est pas obéi ; qui peut empêcher, et qui n’empêche pas. » Cette idée est renforcée par la figure du polyptote « qui peut empêcher, et qui n’empêche pas ».

Les critiques du catholicisme sont exprimées, dans un 1er temps, au conditionnel : « car il pourrait par hasard leur dire les mêmes sottises, et ils feraient peut-être celle de les croire. » cela souligne les erreurs des religieux occidentaux.

II/L’actualisation de la partie adverse dans le discours.

Comment Orou désigne -t-il la partie adverse ?

Ce qui a trait aux catholiques est mis à distance :

- par l’emploi du démonstratif « ce » , « ces » : « Ces préceptes singuliers », « Ces préceptes singuliers » qui instaure une distance.

- par l’emploi de l’article défini de notoriété : « le vieil ouvrier » ; « la chose qui n’a ni sensibilité, ni pensée, ni désir, ni volonté » ; qui viole la nature et la liberté du mâle et de la femelle ».

- par la récurrence d’adjectifs possessifs et de pronoms personnels de 2ème personne qui soulignent la dénonciation et la distanciation ironique : « vous avez rendu la condition de l’homme pire que celle de l’animal » ; « ton grand ouvrier » ; « ton grand ouvrier, à tes magistrats, à tes prêtres ».

III/Les jeux sur les modalités.

Modalité jussive récurrente : « Ne vois-tu pas » ; « Crois-moi » ; « Un jour on te dirait, de la part de l’un de tes trois maîtres : tue, et tu serais obligé, en conscience, de tuer ; un autre jour : vole ; et tu serais tenu de voler ; ou : ne mange pas de ce fruit ; » ; « Attache-toi à la nature des choses et des actions » ; Il s’agit ici d’un impératif d’invite ou d’exhortation qui met l’accent sur la fonction conative du langage (« C’est la fonction d’appel au destinataire présenté comme concerné par ce que dit le locuteur ; sert à faire pression sur l’interlocuteur pour le persuader ».)

Modalité interrogative : mettre en valeur l’interpellation de l’interlocuteur, du lecteur ; il s’agit de faire appel à la raison. Sert aussi à rappeler, tout comme la modalité jussive, le caractère dialogique du texte.

Modalité assertive : nombreux exemples dans le texte : elle sert à donner une impression de vérité, que cette vérité va de soi.

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  • Analyse d’un extrait du chapitre 3

    3 novembre 2008, par bambi

    cet article est très bien mais peut-être un peu compliqué pour moi en tant que lycéen je vous remercie quand même pour m’avoir apporté quelques informations qui m’aideront à consolider mon travail.lol Quentin 77166