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A propos de l'auteur

  • Léna Lartigue

    Étudiante en 2ème année de licence de Lettres modernes à l’université de La Rochelle.

Accueil || Licence de Lettres || Tocqueville || Comment le goût des jouissances matérielles s’unit, chez les américains, à l’amour de la liberté et au soin des affaires publiques ?

Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique II, chapitre XIV, page 195 à 198.

Dans le chapitre XIV de la deuxième partie de son ouvrage De la démocratie en Amérique, Alexis de Tocqueville se place en observateur de la société. Il identifie tout ce qui « menace » la démocratie, comme l’obsession des satisfactions de nos intérêts matériels. Tocqueville aborde le passage d’une démocratie à une monarchie absolue, pendant lequel les citoyens se contentent de leur bien-être personnel, qui réside dans les propriétés matérielles.

Mais, quels problèmes posent le goût des jouissances matérielles ?

Quel est le rôle de la démocratie dans la production ? Quel lien existe-t-il entre la liberté et l’industrie ? En quoi la liberté permet-elle la production de richesses ?

Le développement de la production dépend du régime de l’état. Lorsque le peuple se retire des affaires publiques, il se concentre et s’intéresse davantage aux affaires privées. Seules les affaires privées ont pour le peuple un intérêt puisqu’elles leur permettent l’acquisition de biens matériels. Lorsque le peuple s’intéresse aux affaires privées, il existe temporairement une hausse de la productivité.
Grâce à l’exemple des peuples Tyriens ou des peuples Florentins, Tocqueville prouve que l’activité productive et commerçante de ces derniers est due à leur liberté. La liberté permet de se procurer « plus aisément les jouissances matérielles après lesquelles les hommes soupirent sans cesse ». Pour Tocqueville, il n’existe pas de prospérité matérielle sans liberté : "il y a donc un lien étroit et un rapport nécessaire entre ces deux choses : liberté et industrie".

Comment les affaires privées l’emportent-elles sur les affaires publiques ? Les hommes délaissent-ils leurs intérêts collectifs au profit de leurs intérêts personnels et individuels ? En quoi la démocratie rend-elle les hommes plus individualistes ?

La démocratie semble souligner le caractère individualiste de l’être humain. Puisque celui-ci ne pense plus qu’à son bien-être personnel, à quoi bon s’intéresser -et donc, perdre du temps- dans des affaires publiques ? Une des idées fondamentales de la démocratie est pourtant l’association d’hommes égaux. Le concept de la démocratie et la façon de pensée individualiste de l’homme pose problème : comment serait-ce possible de rendre la vie publique intéressante ? Un homme se croit seul au monde, et s’occupe donc exclusivement de ses intérêts privés. Il ne parvient pas à se voir dans la société, qui est pourtant la sienne. Seules les affaires privées l’intéressent, puisque l’homme est individualiste, c’est-à-dire qu’il a une préférence pour la vie privée au sein de sa famille et de ses amis, mais manque d’intérêt pour la société globale. Les hommes sont individualistes puisqu’« ils n’aperçoivent plus le lien étroit qui unit la fortune particulière de chacun d’eux à la prospérité de tous ».

L’association d’hommes égaux permet-elle la procuration de biens ?
Le régime démocratique permet l’association entre les membres du peuple. L’association permet une acquisition de biens désirés par la population.

En quoi le despotisme pose problème à la production de richesses et au commerce ?

Le despotisme se définit comme une forme d’autorité tyrannique et oppressive, un régime dans lequel le despote a le pouvoir absolu. Il ne peut donc pas avoir un effet sur la production similaire à celui de la démocratie : en réduisant la liberté, il nuit à la production. Si la liberté permet la production, en supprimant même partiellement la liberté des hommes, alors la production, le commerce et l’industrie seront touchés. Le despotisme est, d’après Tocqueville, leur « ennemi ».

Qu’est-ce que le gouvernement ?

La démocratie propose au citoyen d’avoir un petit rôle politique. Les citoyens ne sont pas à la tête du pouvoir mais un rôle leur est tout de même attribué au sein de la démocratie. Tocqueville prouve les droits des citoyens lorsqu’il en énumère quelques uns : « s’agit-il de choisir leurs représentants, de prêter main-forte à l’autorité, de traiter en commun la chose commune ». Bien que « le temps leur manque », les citoyens sont en droit d’avoir un rôle politique : ils ont le droit de vote, leur permettant de donner leur avis quant aux décisions politiques. Or, les citoyens ne font pas pleinement partie du gouvernement puisque les hommes y voient une perte de temps. Les affaires publiques passent de nouveau au second plan, au profit des affaires privées.

Comment la passion du bien-être permet-elle l’éloignement de l’objet de nos convoitises ? En quoi le goût des jouissances matérielles peut-il livrer un peuple à un seul homme ?

Le pouvoir absolu serait « minutieux et tracassier » en démocratie. Effectivement, le peuple se laisserait tromper et abuser lorsqu’il aspire à une trop grande passion pour les jouissances matérielles. Un seul homme pourrait alors parvenir à prendre la tête du pouvoir pour si peu qu’il laisserait à la population le droit de jouir de ses biens. En valorisant le goût des biens matériels, un despote pourrait obtenir un pouvoir absolu sur tout le reste. En quelque sorte, si un homme habile parvient à tromper les citoyens en leur permettant une extrême jouissance sur les propriétés matérielles, ce maître aurait le champ libre sur toutes les autres affaires d’ordre publique. Selon Tocqueville, les hommes ne sont « préoccupés que du seul soin de faire fortune » et ne se rendent donc pas compte que des droits peuvent leur être supprimés : « qu’il veille quelques temps à ce que tous les intérêts matériels prospèrent, on le tiendra aisément quitte du reste ».

Le temps a-t-il un rôle important dans la vie politique ? La démocratie met-elle la vie politique en danger ?
S’occuper d’une affaire publique demande du temps. Le temps consacré à cette affaire publique est du temps de perdu par rapport au temps que l’homme aurait pu utilisé sur une affaire privée. Pour les hommes, le temps qu’ils pourraient consacrer à la vie politique sont des « travaux inutiles ». Tocqueville dénonce le désintérêt global des hommes pour la vie politique : « ce sont là jeux d’oisifs qui ne conviennent point à des hommes graves et occupés des intérêts sérieux de la vie ».

La démocratie offre une plus grande liberté, et donc, la liberté de ne plus s’intéresser aux affaires publiques et de ne se concentrer que sur soi. C’est pourquoi Tocqueville, bien que fervent défenseur de la démocratie, nuance ses propos quant à la liberté proposée par la démocratie.

Comment le goût des jouissances matérielles peut-il être plus fort que la liberté ?
Puisqu’il existe un lien entre la production et la liberté, la liberté n’est qu’une étape dans la satisfaction par les jouissances matérielles. C’est la liberté qui permet les propriétés matérielles, et non l’inverse. La jouissance matérielle semblent être le but le plus important chez l’homme. Le goût pour les jouissances matérielles est parfois démesuré et abusif, ce qui contraint l’homme à être dominé par son désir de propriétés matérielles. Pour illustrer ses dires, Tocqueville prend l’exemple de l’homme aveuglé par ses désirs, qui ne dépend plus de lui-même.

Les Américains proposent-ils une solution pour résoudre les problèmes liés à la démocratie ?

Tocqueville, en quelques sortes, admire la réussite américaine. En effet, les Américains ont évité, malgré leur goût certain pour les jouissances matérielles, de se faire dominer par un tyran. Pour les Américains, la démocratie est la clé de leur bien-être puisqu’elle leur permet d’être libre. La liberté est une valeur fondamentale pour les Américains, c’est elle qui leur accorde à la fois la jouissance de leurs propriétés matérielles, et la perspective de se procurer de nouveaux biens. Le bien-être des Américains réside dans le lien établi entre la liberté (procurée la démocratie) et les propriétés matérielles. Les Américains ont réfléchi quant à leur goût pour les jouissances matérielles : même si cet attrait existe, ils ne perdent pas de vue qu’il existe également des affaires publiques. Comme le dit Tocqueville, la liberté est « la plus grande garantie » et « le meilleur instrument » de leur bien-être. Ils ont compris que s’ils perdaient la liberté, et donc que s’ils se désintéressaient des affaires publiques, ils ne pourraient plus jouir de leurs propriétés matérielles comme ils l’ont fait auparavant. Ils sont donc à la recherche d’un gouvernement qui accorderait la jouissance matérielle, et l’acquisition de nouveaux biens.

_ D’autres questions possibles :

Le développement de la production dépend-il du régime de l’Etat ?
- Le bien-être de l’homme réside-t-il dans les jouissances matérielles ?
- La liberté est-elle utile à la richesse ?
- Se concentrer sur les affaires privées met-il en danger la liberté ?
- Le despotisme est-il subi ou choisi ?
- Une société démocratique peut-elle éviter l’individualisme ?
- L’individualisme est-il l’égoïsme ?
- Le gouvernement existe-t-il vraiment ?
- La passion et la raison sont-elles liées ?