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Le subtil documentaire « les avocats du salopard » de Joseph Beauregard nous plonge en mars 2004, devant la cour d’assises du Var, à Draguignan.

Ils sont quatre… deux avocats chevronnés et deux jeunes commis d’office, à assurer la défense d’Emile Louis, accusé des pires sévices sexuels par sa femme et sa belle-fille.

Ce documentaire suit le déroulement d’une vie quotidienne du point de vue des avocats au cours d’un procès difficile et âpre. Une pièce dramatique avec son unité d’action (le procès avec son verdict en point de fuite), de lieu (palais de justice/ville), et de temps (5 jours).

Caméra à l’épaule, le réalisateur suit donc pas à pas les quatre avocats dans tous leurs déplacements dans le palais de justice, toutes les rencontres avec les journalistes, les temps suspendus dans les vestiaires, à l’hôtel, au restaurant, dans la rue.

Ces quatre avocats évoluent dans un rituel journalier : sorties d’audiences, échanges avec la presse nationale et régionale, discussion au vestiaire, séances de préparation de la plaidoirie à la bibliothèque, à l’hôtel, au restaurant. Autour d’eux gravitent des personnages secondaires (journalistes, huissier, président de la cour d’assises, public).

Peu à peu se dessine le portrait subjectif de quatre artisans du droit, toujours sérieux, touchants ou ironiques, parfois épuisés par les événements, mais toujours terriblement combatifs.

Dans cette histoire, le spectateur est en effet le témoin privilégié de leur combat, de leur découragement, de leurs coups de colère face à la partialité des débats et des questions, leur refus de céder à la résignation, malgré le doute et la fatigue.

Dans la salle d’audience où le débat public se noue, on pénètre à peine… Les portes s’ouvrent et se ferment… avalent l’affaire et ses acteurs... on reste à côté. Dans ces couloirs où les avocats affrontent la presse, dans le vestiaire où ils plaisantent et se réconfortent, dans la bibliothèque où ils se concentrent et travaillent, le spectateur assiste véritablement à la fabrique méconnue de la défense d’un « salopard ».

Les plus belles séquences du film se situent d’ailleurs très certainement dans la bibliothèque des avocats, ou sous le halo des lampes et des dossiers éparés, nos quatre défenseurs, stylos à la main, préparent leurs plaidoiries et se répartissent les rôles.

A travers ce documentaire captivant, l’émotion vient également envahir le spectateur lorsqu’on aperçoit une dernière fois nos quatre avocats avant le procès final ; tendus et concentrés… puis quelques heures après… vidés et fatigués, attendant le verdict dans cette fameuse bibliothèque…

Un mot également sur la bande son du film où Joseph Beauregard a porté la plus grande attention à la partition musicale avec l’insertion de paroles chuchotées, sonneries violentes, voix de l’huissier, du président, des journalistes et enfin des murmures de la foule.

Fort et poignant, ce film retrace finalement bien le quotidien des 4 avocats au cours d’un procès ; explorer les différentes facettes de leur métier, les regarder vivre et travailler en coulisses jusqu’au verdict.

Filmer l’élaboration intellectuelle d’une plaidoirie dans ses aspects les plus concrets, décrire le rituel des sorties d’audiences, le ballet des robes dans le vestiaire, capter l’atmosphère des coulisses et les visages crispés dans l’attente du verdict.

Rendre compte aussi d’une profession, d’une pratique sans patrie ni frontière, celle de l’avocat qui défend coûte que coûte un accusé.

Enfin, ce documentaire hante également en nous la question suivante : « Comment ces quatre hommes font-ils pour défendre un type pareil ? ».

Un réel témoignage de la grandeur et de l’âpreté de cette profession qui nous fait ressentir que défendre « le salopard », c’est aussi exercer l’un des métiers les plus précieux dans une démocratie.

Anthony Buret