Recherche

A propos de l'auteur

  • Elza Rougier

    Licenciée de Lettres Modernes et de LLCE Portugais
    Hobbies : boxe française, hip-hop, sorties culturelles ...

    Contact : elza.rougier@etudiant.univ-lr.fr

Accueil || Licence de Lettres || Licence Pro || Cinéma || Tous au Larzac : Rouaud re tricote la lutte des 103

Plus de trente ans se sont écoulés. Christian Rouaud tire sur le fil des souvenirs des paysans engagés et livre un témoignage saisissant. A l’appui, des personnes attachantes, des sous-entendus ironiques, des larmes aussi. Mais surtout, le paysage des Causses. Transcendant, humble, calme, à l’image du mouvement non violent des paysans du Larzac.

Octobre 1970, Michel Debré, ministre de la Défense, prend la parole. La nouvelle sonne comme un coup de glas pour les paysans du Larzac. Le projet d’extension du camp militaire est divulgué. Actif depuis 1902, la Cavalerie du Larzac étendrait ses 3 000 hectares de superficie à 17 000 hectares. 103 fermes seraient condamnées par cette action.
Contextualisée dans une société post-soixante-huitarde, la décision de Debré fait face à une levée de boucliers.
Le leader est Guy Tarlier, décédé aujourd’hui. Très présent lors du mouvement, il l’est aussi dans le film de Rouaud. Le souvenir porté par sa femme Marizette, les images d’archives, nous immergent dans le mouvement aux côtés du grand homme.
La contestation a créé la solidarité entres les paysans. Les natifs se connaissaient peu. Ils se sont regroupés sous une seule et même consigne : ne pas céder les terres aux militaires. Très vite, ils sont rejoints par des partisans de tous bords : altermondialistes, gauchistes, hippies... La non violence prime. La diversité de la multitude amène les paysans du Larzac à se confronter, à se politiser. Les idées fusent mais le dernier mot reste aux autochtones.
L’année 1981 marque l’issue de la lutte acharnée. L’élection de Mitterrand a soufflé comme un coup de vent sur les Causses. Christiane Burguière, propriétaire de la ferme de l’Hôpital, témoigne à la face de la caméra du réalisateur son désarroi. Bien sûr qu’elle est heureuse du dénouement, mais que faire ? Que faire après dix ans d’implication totale dans une cause ? Comment gérer l’après ?


La griffe Rouaud

Tranches de vies par le biais d’un documentaire. Les témoignages des principaux militants donnés aux quatre vents des Causses, et les images de l’époque, plongent le spectateur au coeur de la bataille.
Une heure cinquante-huit de narration de faits et l’on ne s’ennuie pourtant pas ! C’est que le film de Rouaud est rythmé par des anecdotes truculentes. La scène de l’occupation du champs de Mars avec des brebis - elles ont fait courir « les hirondelles » de la nation française, a suscité l’hilarité des spectateurs dans la salle. Les rires ont d’ailleurs fusé à de nombreuses reprises. Face à un sujet pourtant sérieux, l’humour l’emporte. La légèreté du film est conduite par une équipe de militants qui monte une « bonne mayonnaise ». Mais s’en détache un personnage, Léon Maillé qui a toujours le mot pour (faire) rire.
La technique usitée par le réalisateur fixe notre attention. Il donne vie à ses témoignages, les sortant des studios, les faisant se promener dans le Larzac et jouant sur les flous et les contrastes. L’oeil et l’âme du spectateur sont ainsi en perpétuel éveil.
L’attachement pour les personnages et la cause germe aussi de la modestie du documentaire et de son réalisateur. Bien que Tous au Larzac soit une remise au goût du jour avec entre autre, les affaires du gaz de schistes et des O.G.M, il n’est pas prétexte à une leçon moralisatrice. La rencontre, lors de la séance du 28 novembre à la Coursive avec Christian Rouaud, a amplifié ce sentiment d’empathie.
Une discussion entre ce dernier et les spectateurs a installé une ambiance chaleureuse. Au lieu de questions, c’est un partage de tranches de vie qui s’est instauré, perpétuant la solidarité et la convivialité qui émane du projet Rouaud.

Elza Rougier